Ce troisième tome de l'Histoire de l'École française d'équitation est un hymne à la liberté de monter à cheval selon ses convictions personnelles, que l'on soit sportif ou artiste, deux sensibilités qui ont le droit d'exister indépendamment l'une de l'autre, sous peine de discrimination. Ce n'est pas ce que nous observons sur le terrain. La compétition renvoie à son Règlement à chaque fois qu'un cavalier entend faire de l'Art ! Cette aliénation conduit tout droit à un véritable génocide culturel. Or, nous ne sommes pas sans savoir qu'avec la vitesse, régulièrement confondue avec l'impulsion, le cheval se rigidifie de partout. Que signifie la légèreté dans ces conditions ? Là est toute la question et c'est ce qui fait la différence entre le sport et la haute école.

Jusqu'au XIXe siècle, les écuyers repoussent le questionnement équestre aux limites des connaissances acquises, sans négliger de faire appel aux savants de leur époque. Aujourd'hui, cette curiosité intellectuelle est rarissime et les retombées de cette indifférence sur le dressage du cheval sont désastreuses. Avec sa volonté de tout réglementer, le sport fait croire au cavalier attiré par le dressage qu'il n'existe pas d'autre alternative que la compétition dont la vision officielle atteste d'un caractère définitif qu'elle n'a pas. Le XXe siècle s'en est allé, en laissant derrière lui un Règlement établi sur des certitudes et un abîme d'interrogations restées sans réponses, un vide que l'équitation sportive ne comble pas.

Quantité de cavalières et de cavaliers recherchent la légèreté sans avoir la moindre conscience qu'elle est le corollaire d'une liberté d'expression qui n'existe pas, chez le cheval, si le cavalier ne bénéficie pas, lui-même, de toute sa liberté d'expression. Il était donc de toute nécessité de porter à la connaissance des cavaliers ce principe intangible selon lequel l'Art n'est assujetti à aucun Règlement, et c'est tout le paradoxe du sport qui entend bénéficier des propriétés de la haute école tout en cultivant celles de la vitesse ! Bien entendu, l'opération est irréalisable. En revanche, l'École française prend le temps de reconstruire la posture du cheval pour le rendre facile et agréable à monter, ergonomique en un mot. Elle va même, selon Étienne Beudant, jusqu'à lui donner la possibilité de briller pour se montrer dans toute sa splendeur. Alors, le cheval se grandit, porte l'encolure le plus haut possible et place la tête dans une position voisine de la verticale, au ramener. C'est la raison pour laquelle ce livre offre aux sensibilités artistiques une alternative à l'équitation sportive. Comme tous les artistes, nos grands écuyers ont été des hommes de rupture. Un Baucher ou un Beudant ont pratiqué l'école de la liberté. C'est elle qui leur a permis de repousser les limites de la pensée disponible.

Cet ouvrage est un magistral coup de projecteur porté sur les problèmes que posent encore l'équitation et le dressage du cheval au XXIe siècle, malgré l'accroissement des connaissances et l'amélioration des races. On préfère appliquer le Règlement que faire preuve de curiosité et de créativité. C'est pourquoi Dominique Ollivier s'interroge sur des sujets que l'on croyait acquis de longue date, ce qui le conduit à remettre en question des certitudes qui n'ont plus lieu d'exister. Mille cinq cent pages ont été nécessaires pour démontrer que l'École française ne procède pas plus de l'équitation militaire que du sport réglementaire qui en découle mais cherche à asseoir l'équitation sur des bases d'autant plus objectives qu'elles sont biologiquement satisfaisantes et débarrassées de toute contrainte. L'exposition de sa Doctrine achèvera de convaincre le cavalier épris d'Art et de liberté.

Un projet qui pourrait se résumer à ces quelques mots : " Cavaliers, mettez de l'intelligence dans votre équitation, alors le cheval vous apparaîtra sous un aspect qui échappe à tous ceux qui n'imaginent pas que l'Art existe indépendamment de l'équitation artistique officielle dont la seule soumission à une autorité constituée lui enlève ipso facto toute prétention artistique. "

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